lundi, juin 19, 2006

Snif !

Je ne suis pas matérialiste, loin de là. Mais je me soigne, question de ne pas demeurer aussi inadapté à la mentalité moderne que j'ai souvent pu l'être...

Donc pour moi, une voiture, c'est un amas de tôle. En gros. C'est sûr que chez Lamorgini on la froisse un peu mieux, que chez les Allemands on la fixe avec une belle robustesse... Mais au bout du compte, ce n'est que de la tôle et la rouille un jour ou l'autre la transpercera. Comme Anna-Mazdalena...

Pourtant, tout à l'heure, quand je l'ai vue s'éloigner conduite par d'autres mains, sachant que je ne la reverrais probablement plus jamais, j'ai éprouvé un petit pincement. J'ai compris pourquoi les capitaines donnaient souvent un nom de femme à leur bâtiment, leur voilier, leur embarcation; j'ai compris l'attachement des pilotes à leur zinc, celui du cavalier à sa monture. C'est davantage qu'un objet. C'est devenu une partie de toi. Un artéfact, une extension de ta liberté, de ton mouvement. Ce sont les ailes que tu n'as pas reçues à ta naissance. Ce fut la tente dans laquelle j'ai souvent dormi, été dans les maringouins, printemps dans la pluie, hiver dans le froid et automne dans le noir. C'est la compagne avec laquelle tu as franchi des tempêtes, celle qui t'as fait voir le bout de la route, l'ile d'Anticosti et la pancarte de Natashquan; celle sur qui tu pouvais toujours compter pour fuir la région où ton coeur gisait en mille morceaux, dans les bois francs d'Outaouais, traverser le Québec pour te réfugier le temps d'une soirée dans le rire de tes potes et les aurores boréales de Charlevoix, à écouter les conseils ivres du pinson et de l'aube toujours trop hâtive de l'été trop rapide; c'est aussi celle qui t'a parfois piqué des crises au pires moments, qui bouillait et vaporisait quand t'étais déjà en retard. Comme un vieux couple - avec ces chicanes et ses randonnées du dimanches réconciliées.

Elle n'était qu'une montagne de pauvre tôle perdue d'avance, Anna-Mazdalena, pourtant, quand je l'ai regardé s'éloigner de ma vie pour tout le temps, j'ai eu l'impression de lui devoir quelque chose.

Peut-être les Innus ont-ils raison et que certains objets possèdent une âme...

Quoiqu'il en soit :

- Hèye, so long and thanx, Mazdalena ! Bonne route.

5 commentaires:

PatB a dit...

Sophie est en train de t'écrire un commentaire-fleuve sur l'autre ordi.

PatB a dit...

Elle est folle.

PatB a dit...

Juste folle

Coyote inquiet a dit...

Si les cavaliers Mongols peuvent faire n'importe quoi sur leur cheval, manger, dormir et même des cochoncetés, imagine comment c'est facile dans une auto. Pour ça que je n'en parle même pas...

Pff, sur des divans, c'est encore plus facile !

Je comprends ton attachement à tes amoncellements bois-sorte de tissus... Y,a même des trous de cigarette qui sont à moi là-dedans. Moi aussi, j'y suis attaché.

Vous vous parlez par ordinateur maintenant ? Et sur MON blogue ?... Ouste !

;o)

Coyote inquiet a dit...

Et Dieu sait que Patrick est bon pour péter de la broue : "on va sortir dehors, un jour, un jour, un jour..."