Je vous ai déjà dit que j'écrivais ? J'ai des tonnes de calepins remplis. Plusieurs de perdus au cours de brosses, d'ailleurs. J'écris tout et n'importe quoi - on the spot ! J'ai écrit toutes sortes d'affaires, toutes sortes de choses, et dans tous les états. Surtout avant. J'étais jeune. Un journal de 2000 pages avant ça. Je l'ai conservé. Ce que je ne perds, pas, je ne le brûle pas. Même tout ce que je peux regretter avoir écrit. Je le place quelque part, je l'empaquette et je l'oublie. J'écris à chaud, brûlant parfois. Collé sur le sujet sans recul aucun. Manque de discernement ? Pas grave - ça libère toujours sacrément plus. C'est comme un blogue, où tu décides de sacrer si ça va vraiment mal : très loin de la littérature, mais libérateur pour celui qui l'écrit. Et parfois ça fait du bien de le lire chez quelqu'un d'autre. On se dit qu'on n'est pas seul à vivre une crise, à vivre des pinacles d'intensité, qu'ils soient positifs ou négatifs. Et de toutes façons, si elle n'est pas ça, la littérature, une trace vivante et barbouillée d'expérience, de vécu, d'épreuve, l'écho authentique et spontané d'un moment à bras le corps avec la vie, où on a mis notre âme en péril et notre coeur sur la table, près du cendrier, comme un révolver chargé, alors qu'est-elle ? Une recette ? Un apprentissage esthétique, un encadrement normatif (conformisateur, conformisant - dictio trop loin..), un diplôme, une modélisation sur ce qui a antérieurment été fait, une imitation des formes confirmées avec la prise d'un soin particulier pour en évacuer toute fièvre, l'intangible et l'imprévisible élan qui les ont générées. Non. Il y a souvent eu de l'excès et de l'exaltation dans l'acte et/ou le produit littéraire, poétique surtout. Et ça, pense pas que ça soit près de changer, n'en déplaise aux législatures. Bref, le blogue, plusieurs blogues sont, momentanément du moins, parfois plus régulièrement, mus par le même élan, imprégnés de cette même folie libératrice et de ce fait méritent d'appartenir à la classe littéraire, d'être considérés dans l'espace littéraire et admis en tant qu'élément propre au même titre que d'autres formes. Une improvisation de jazz est aussi de la musique qu'une symphonie ou une pièce contemporaine plus achevée et méditée. Et puis, la forme, la surface, le poli, c'est bien beau !... Mais de temps en temps, y'a aussi le fond. Et ce fond, d'après moi, c'est la liberté.
Enfin. Bon. Pourquoi je vous dis tout ça, dont, déjà ?... Pas là pantoute où je voulais en venir, mais c'est bon de se perdre des fois.
Cette dérape philosophique vous a été gracieusement offerte par le consortium de commandite : Darnziak Corporation - "On pense pour vous " (;o)).
Ah oui, tiens ! Un 'tit boutte de ce que j'écrivais, disons en février 2002 :
Dimanche 10
Jardins des tuileries. Autour de la grande fontaine. L'obélisque en face. Les sol est beige, les statues un peu plus crème. Le ciel n'est qu'une lourde grisaille répondant en écho parfait à celle que je vis intérieurement. Les enfants s'amusent avec leurs voiliers dans la mare de marbre. Ils les lancent en travers, bon plein, parfois carrément en près serré. Ils les poussent avec une canne de bambou jusqu'à ce que le fort vent de février d'aujourd'hui prenne la relève. La quille offre un surprenant contrepoids. Un étrange oiseau au sommet du gros platane derrière moi. Par moments, on dirait un merle, puis un goglu, puis une ménate et enfin un étourneau. Étrange oiseau... Véritable polyglote du chant, comme plusieurs Européens d'ailleurs. La grisaille qui ne cesse et toute la solitude que je vis ces temps-ci finissent par me déprimer. Je devais aller rejoindre Hanane et Philippe au Bagdad Café, mais je ne m'en sens pas le goût. Presque envie d'écrire que je ne m'en sens pas la force. Le vent se renforce. Les voiliers des enfants fendent littéralement la fontaine en deux. Les femmes sont toutes tellement belles par ici; mais si froides et inabordables. Jamais je ne parviens à établir de contact, chaleureux, juste humain. Elles se cantonnent dans une défensive, se renfrognent dans leur siège fortifié. Ou c'est moi le problème ?... Peu importe, le résultat est le même : la communication ne s'établit pas, ça marche pas. C'est guère mieux avec les hommes, d'ailleurs. Y'en a un peu pas mal marre, de la ville lumière ! Je souhaiterais tellement pour un cours laps de temps retourner chez nous, dans mon pays de ciel et d'horizon, marcher ne serait-ce qu'un après-midi dans un champs immaculé, ébloui de soleil ! (Un goéland à manteau vient de pêcher une perchaude ou qqchose du genre...)
J'ai encore le coeur pas mal brisé par Sarah-Lune. J'ai (...)
21h40
Vient de parler à Sarah-Lune. Elle s'en vient à l'apparte et veut coucher avec moi, qu'elle m'a dit. Presque du même souffle elle me lance qu'elle vient de se faire une nouvelle maîtresse... Quel mystère, cette fille ! Pourquoi diable lui ai-je téléphoné ? Elle me fascine. Je suis ensorcelé. Dire que je venais à peine de raccrocher d'un téléphone d'une heure avec N*** au cours duquel, une fois de plus, elle a réussi à me faire retomber sur les pieds, à recroire au futur, en ma nature artistique et en ma capacité de parvenir à en faire sortir quelque chose de potable éventuellement. Puis Sarah-Lune qui s'amène, tornade, douce et tranquille, paisible comme l'oeil du cyclone - qu'un trop court instant devançant le trop prévisible ouragan. Vais encore me pulvériser le coeur, c'est inévitable. Mais je pourrai écrire. J'aurai des choses à raconter, à dire. Des choses vécues, dont je pourrai parler avec une connaissance juste et quelque discernement. Je suis en train de fermer les stores et la lumière, et d'inviter un vampire : c'est insensé. J'en suis conscient, et je le fais tout de même. Le coeur humain est un étrange organe. Je suis tombé amoureux de la pire personne à avoir croisé ma route je pense bien, la plus folle en tous cas. Mais je me sens vivre à nouveau. Intensément. Écrivain ou artiste, ou sur le point de. Et ça je lui dois à elle, cette tornade qui aura transpercé mon année. L'homme est le seul animal qui puisse espérer et rechercher le danger au lieu de le fuir. Pourtant j'étais arrivé à des conclusions pleines d'espoir au terme du téléphone de N*** : Paris est à chier, certes ! l'Europe guère mieux, mais quelques mois encore d'efforts et je pourrai retourner. Et écrire comme je le souhaite. Une petite maison m'attend sans doute là-bas, peut-être en Outaouais. Paris m'aura inspiré une galerie de personnages, des passages, un roman au complet qui sait ? J'aurai vu du pays, remboursé mes dettes et, si je persévère jusqu'à la fin, j'aurai accumulé un bon motton qui m'aidera à m'établir au retour. Sauf que là, crétin ! tu t'apprêtes à entrer une fois de plus dans la tanière du loup, l'antre de l'ours. Tu t'en vas valser avec la tornade de Montparnasse !... (Tu crois que tu vas t'en tirer sans casse ?!)
Lundi 11
Tout est factice à l'extrême ici en Europe, à Paris. L'affectation règne partout, c'en est affligeant.
Jeudi 14
Lendemain de souper. Avec Étienne, Béatrice (Espagnole) et Stéfania, une superbe petite Italienne. Sobre et saine - et célibataire. Gentille, éduquée, avec de la classe. Le contraire de Sarah-Lune, quoi ! Mais c'est de Sarah dont je rêve. Je n'y peux rien. Odeurs ? Vibrations ? Son de sa voix ? Les moments qu'on a vécus ? ... Quels sont les ingrédients du désir et dans quelle mesure chacun intervient-il et participe-t-il au résultat final ?... No se. Etc.
Bon oké. Ça va faire là bande de voyeurs !
Hé hé.
vendredi, juin 02, 2006
Délire autour d'un calepin retrouvé
Publié par Coyote inquiet à 5:06 p.m.
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3 commentaires:
Salut Harry,
Normal que ce bout de carnet déplaise à qqun qui aime bien Paris et l'Europe ; et je suis tout à fait conscient de ne pas être politiquement correct le livrant tel quel. Je t'assure que j'aurais préféré vivre dans de pareils décors enchanteurs et historiques une expérience humaine plus agréable, mais ce ne fut pas le cas. Je n'ai pas été chanceux ou me suis mal adapté, mais le résultat a été que j'ai senti ce que j'ai ressenti. C'est juste de ça dont il est question ici : d'une sensation, d'un sentiment de raz-le-bol qui m'habitait alors.
J'aime beaucoup l'intro. Ça me réconforte et m'encourage à penser que mon blog est pas juste un sac à vomi d'émotions.
Le désir... On sait, mais pourtant, rien ne peut empêcher cette poussée vers la perte. Ça t'aspire, ça te défait de tout bon sens, tout contrôle. Le pire je pense, c'est que quand le désir est si fort, il bouffe tout le reste. Et te fait croire qu'il est autre chose, que tu as besoin de lui, que tu n'es rien si tu ne l'assouvi pas.
Mais mes yeux sont ouverts maintenant. Et j'espère que plus jamais je ne le prendrai pour autre chose. Je me suis fait fourrer une fois, mais j'apprend vite.
Ouais, le désir, éblouissante illusion, obsession tournoyante...
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