lundi, décembre 26, 2005

Jeune et malade mais en santé à Narnia

J'étais jeune... et malade. Pneumonie ou quelque chose du genre. Je me souviens de la chambre blanche, l'acier chirurgical, les pas de ma tante dans le couloir comme un os sur un tronc creux quand ma mère ne pouvait pas venir. Régnait une lumière de fin d'hiver comme on les avait toujours à l'époque, lasse, blafarde. J'avais malgré tout des grands yeux ouverts vers la vie et je n'ai jamais douté que c'est vers là que je m'en allais. La guérison n'était qu'une formalité agaçante, mais pour me motiver, j'avais reçu le dernier Matt Mason, un espèce d'astronaute de caoutchou et son avion de plastique. Mais surtout, pour m'aider à endurer les longs après-midis assis dans mon lit métallique, on m'avait donné un livre. Un de mes premiers, sinon LE premier. Un livre de C. Lewis si je me souviens bien : le lion et la sorcière blanche.

C'est tout un monde que je tenais dans ces pages de vieux papier beige et qui se révélait à la lenteur de l'épellation. Je ne lisais pas une histoire; je la vivais. Je savais exactement. Je connaissais l'odeur des manteaux de fourure dans le garde-robe, puis celle des grands pins blancs du monde hivernal dominé par la sorcière blanche. La seule chose qui m'échappait dans cette histoire, c'est le Rahat-Loukhoum. Je n'avais aucune idée de quoi il était question. Je comprenais seulement qu'il s'agissait de bouffe, d'un dessert apparemment. Je me disais que ça devait goûter la tarte au sucre, ou le bon beurre d'érable dont on se goinffrerait bientôt, peu après ma sortie de l'hôpital.

J'allais voir King Kong, ou Maurice Richard hier soir, histoire de braver la tempête mais de fuire le vide. Puis j'ai vu l'affiche, le lion, les références à la chevalerie anglaise, les quatre enfants... J'ai immédiatement choisi de renouer avec la (probab.) première lecture de ma vie. C'était aussi frais que si je l'avais lu hier. Tout me revenait au fur et à mesure, jaillissant des replis les plus ombrageux de ma mémoire, tel des lucioles des orées noires, l'odeur de la première neige. Le livre est ressorti tout bonnement du rayon, empoussiéré par 35 ans d'oubli, mais chaque page intacte.

C'est vraiment curieux, la mémoire... Dire que des fois j'ai peine à me souvenir de ce que j'ai fait le jour précédent !

Anyway.

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